Rencontre avec Claudia Rivera, créatrice de l'évènement Ñañaykuna

Photographe et étudiante d'origine péruvienne, Claudia Rivera a créé l'évènement Ñañaykuna pour mettre en lumière la communauté et la culture franco-latina. Cet évènement dédié à la création aura lieu du 25 au 27 mars 2022 au LeStudio à Paris. Claudia Rivera et ses invitées y exposeront leurs œuvres dans une volonté de "dé-construction de l’imaginaire exotisant et fantasmé à leur égard". Nous nous sommes entretenus avec Claudia pour en savoir plus sur son évènement et sa pratique artistique.

Affiche et programme de l'évènement Ñañaykuna.

Hello Claudia, bienvenue sur le Magazine Lomography ! Pourrais-tu te présenter ?

Hola Lomography ! Merci pour votre invitation !
Je m’appelle Claudia Rivera, j’ai 22 ans et je suis une jeune artiste photographe. À côté de ça, je suis également étudiante en Master d’Études de genre à l’Université Paris 8.
Mes deux parents sont d’origines péruvienne et sont venus en France au début des années 90. Moi je suis née en ici et plus particulièrement à Paris en 1999.
Toute ma famille se trouve au Pérou mais j’ai la chance de pouvoir m’y rendre régulièrement et même d’avoir habité là-bas un moment. C’est d’ailleurs entre mes allers-retours qu’est né mon amour pour la photographie.

Photos argentiques prises par Claudia Rivera.

Qu'est-ce qui t'a donné envie de monter l'évènement Ñañaykuna ?

C’est au sein de mes études qu’est né le projet Ñañaykuna, mon sujet de mémoire se portant sur la représentation des femmes latino-américaines en France. Il s’agit d’une question peu abordée depuis le contexte français. C’est pour cela que j’ai voulu la faire sortir du cadre universitaire afin de la rendre plus accessible à toutes et tous.
Pour accompagner mon mémoire j’ai donc décidé d’organiser un projet photo avec des amies d’origine latino-américaine… J’ai par la suite également passé une annonce sur les réseaux sociaux afin de réunir toujours plus de participantes.
J’ai eu avec étonnement beaucoup de réponses, ce qui a transformé le simple projet de recherche universitaire en un grand projet photographique valorisant la pluralité des femmes latinas.
Suite à ce projet et ses retours positifs, j’ai voulu aller encore un peu plus loin en créant tout un événement qui se place dans sa continuité : l’Événement Ñañaykuna. Un événement pluridisciplinaire de trois jours, où nous, femmes latino-américaines, pouvons faire découvrir notre art, nos cultures et nos histoires… afin de toujours plus mettre en lumière la diversité présente au sein de notre communauté.

Photos argentiques prises par Claudia Rivera.

Comment as-tu choisi tes invitées ?

Toutes mes artistes et intervenantes invitées sont des femmes d’origine latino-américaine avec des parcours multiples. Certaines sont nées ici de deux parents latinos, d’autres sont métisses, d’autres sont nées dans leur pays d’origine, d’autres sont adoptées… Chacune a donc un rapport différent à l’Amérique Latine et à leur identité, ce qui rendra l’évènement d’autant plus riche.
Toutes les artistes placent également au cœur de leur travail les questions autour de leurs origines, de leur famille... Ce qui permettra aux visiteuses et visiteurs de découvrir une multitude de récits !
Vous pourrez notamment découvrir le portrait de Laure Anne, la sœur jumelle de la photographe Hélène Tchen, toutes les deux d'origine chinoise et Colombienne. Ou encore le magnifique portrait de famille à Cali en Colombie de la photographe Bettina Pittaluga qui est originaire d'Uruguay.
De plus, jusqu'à il y a un an j'ignorais qu'il y avait quelques photographes latinas en France, je suis d'autant plus fière de pouvoir travailler avec elles aujourd'hui ! Je suis si admirative de leur travail !

De gauche à droite, de haut en bas : Milena Carranza, Hélène Tchen, Maira Villena et Bettina Pittaluga.

Parles-nous un peu plus de pratique personnelle et pourquoi utilises-tu l'argentique ?

La photographie a été un moyen de relier mes deux pays qui sont le Pérou et la France.
J’ai grandi en voyant mon père prendre énormément de photos et de vidéos afin de garder un lien avec nos familles malgré les 10 000 km qui nous séparent. C’est à ce moment-là que j’ai compris la valeur et l’importance de la photographie. J’ai donc tout naturellement voulu faire comme lui.
J’ai commencé, petite, par prendre des photos de tout ce que je faisais ici afin de faire découvrir ma vie en France à mes proches au Pérou. Ce sont deux pays si différents… qu’à travers la photographie j’ai réussi à me rapprocher de mes proches en leur faisant découvrir mon quotidien.
À cette époque mes appareils étaient des petits jetables ainsi que la caméra de ma Nintendo DS… puis en grandissant j’ai eu rapidement des petits appareils numériques dans les mains qui m’ont éloignée de la photographie argentique. Mais lorsque j’ai commencé à partir au Pérou seule pour une année ou plusieurs mois, c’est naturellement que je suis retourné vers la photographie argentique. J’aime partir avec mon boitier là-bas, rester pendant plusieurs mois sans savoir vraiment ce que j’ai pu photographier… Puis revenir ici et tout redécouvrir, comme si je voyageais une deuxième fois !
Lors de mon dernier voyage j’ai eu d’autant plus de surprise car je ne trouvais pas de pellicules là-bas, et qu’une bonne partie de mes photos se sont faites avec des pellicules périmées de dizaines d’années.
Plus récemment je me suis aussi acheté un scanner afin de pouvoir toujours plus participer au processus de création de ma photo.

Photos argentiques prises par Claudia Rivera.

Quelle force a pour toi la photographie pour changer les représentations ?

Les images sont omniprésentes et ont un rôle primordial dans la construction de soi… Nous avons besoin d’avoir des modèles auxquels on peut s’identifier afin de mieux comprendre qui nous sommes.
La force de la photographie est donc qu’elle nous permet d’offrir de nouvelle représentation mais aussi de reprendre le contrôle sur celles qui nous sont associées jusqu’à présent.
À travers le projet Ñañaykuna, j’espère pouvoir proposer de nouveaux modèles de femmes latino-américaines se plaçant en opposition au modèle stéréotypé qui ne permet pas de saisir toute la diversité existante au sein de notre communauté et qui participe à maintenir une vision exotisante et déshumanisante de nos corps.

Un dernier mot pour la fin ?

Je pense que nous sommes toutes très fières d’avoir enfin un espace où nous pouvons affirmer nos identités et raconter nos histoires. Il y a tellement peu d’évènements comme cela en France…
Nous vous attendons donc nombreux et nombreuses à l’événement Ñañaykuna ce weekend !


L'évènement Ñañaykuna, organisé par Claudia Rivera, aura lieu du 25 au 27 mars 2022 à LeStudio au 38-40 Rue de la Victoire, 75009 Paris. Retrouvez la programmation et la billetterie sur cette page.

2022-03-22

Les articles les plus captivants