Le monde étrange des "espaces liminaires"

Dans les heures tardives, lorsque Moscou se calme et que l'effervescence de la foule s'estompe, Nikita Parnyuk trouve un certain réconfort à photographier les espaces vides de la ville. Sous l'atmosphère sombre de ses images se cache une profondeur émotionnelle, capable de troubler ou d'apaiser.

Dans cet entretien, Nikita nous parles des "espaces liminaires" (ou liminal spaces) et comment ils sont devenus le thème principal de son travail. Il évoque le processus créatif de ses photos lugubres, ses pellicules préférées et le lien personnel qu'il entretient avec ce concept.

Crédits: Nikita Parnyuk

Bienvenue sur le magazine Lomography ! Peux-tu te présenter à la communauté ?

Bonjour ! Je m'appelle Nikita, j'ai 31 ans et je vis actuellement à Moscou, en Russie. Je travaille en tant qu'ingénieur civil dans la conception de centrales nucléaires et je photographie sur pellicule comme hobby.

Quand et comment as-tu commencé la photographie argentique ? Raconte nous ton parcours photographique.

J'ai commencé à prendre des photos avec mon premier téléphone Sony Ericsson à 13 ans. Tout ce qui m'entourait était capturé dans mon cadre : mes animaux, la nature de mon pays natal, la beauté des levers et couchers de soleil. Après mes études, j'ai déménagé à Moscou et j'y ai acheté mon premier reflex numérique (petite anecdote : l'appareil a été acheté avec l'argent restant d'une indemnité d'assurance suite à un léger accident de voiture). Puis, j'ai vu un ami publier une photo de lui prise avec une pellicule, avec la légende : "Au moins, une personne dans ce monde se souvient encore de ce qu'est l'argentique." Cette phrase m'a inspiré et je me suis immédiatement acheté un appareil photo argentique.

À mon arrivée à Moscou, j'ai été immédiatement impressionné par la beauté du métro, surtout aux heures tardives, lorsque l'affluence se calme. Au bout d'un moment, l'idée d'allier ma passion pour la photographie et le métro vide m'est venue. C'est ainsi qu'est née une orientation créative unique.

Crédits: Nikita Parnyuk

Comment décris-tu ton style photographique ?

Il m'est difficile de répondre à cette question. J'aime l'expression "techno-noir", mais je ne sais pas si elle s'applique à mon travail. Le style le plus proche que j'ai pu trouver est celui des espaces liminaires.

Beaucoup de tes photos suivent un thème d'espaces liminaires. Quelle est ta définition personnelle d'espaces liminaires ? Qu'est ce qui t'attire dans ce concept ?

Les espaces liminaires sont des espaces anormalement vides. Je divise l'art des espaces liminaires en deux catégories : celui qui évoque un sentiment d'anxiété et d'inquiétude, et celui qui, au contraire, apaise et peut même susciter une certaine nostalgie. J'aimerais savoir dans laquelle de ces catégories les spectateurs classeraient mon travail.

Quelle a été la première photo de cette série ? Comment as-tu découvert ce style ? Quand as-tu commencé à dédier ta photographie aux espaces liminaires ?

J'ai une photo prise avec ma toute première pellicule. Elle montre les phares d'une voiture isolée, la nuit, au milieu d'une autoroute déserte et brumeuse. D'après moi, cette photo est ma meilleure œuvre. En général, on peut répondre à cette question ainsi : j'ai pris des photos pendant longtemps sans savoir que je photographiais des espaces liminaires.

Crédits: Nikita Parnyuk

Expliques-nous ton processus créatifs de A à Z. As-tu un système ou es-tu plus intuitif ? Quelles techniques utilises-tu pour ce concept ?

Mon approche peut être à la fois systématique et intuitive. Par exemple, j'ai récemment photographié le métro de Saint-Pétersbourg, après m'être préparé à l'avance et avoir indiqué sur ma carte les stations à visiter. Pour ce qui est de l'aspect intuitif, j'essaie d'emporter plus souvent une pellicule compacte Ricoh, afin d'avoir de quoi photographier si je sens que je peux obtenir une bonne photo. Bien entendu, il faut souvent attendre longtemps avant qu'il n'y ait plus personne dans le cadre, c'est pourquoi j'aime photographier tard le soir.

Crédits: Nikita Parnyuk

As-tu une pellicule préféré ou des appareils photos qui t'aide à obtenir l'ambiance que tu recherches?

J'aime bien les résultats des prises de vue sur CineStill. J'ai même pris des photos très atmosphériques avec un Fuji Eterna périmé. Bien évidemment, la Lomography Redscale a été une découverte très agréable.

Quelle a été ton expérience avec la pellicule Lomography Redscale? Quels autres produits Lomography as-tu testé ?

J'ai aimé cette couleur orange toxique sur l'une des photos d'un abonné. J'ai immédiatement décidé de l'essayer et le résultat m'a vraiment plu. L'effet donné est post-apocalyptique et très dramatique.

J'ai aussi récemment réussi à photographier avec la LomoChrome Turquoise. Grâce à la magnifique palette de couleurs de cette pellicule, le monde souterrain du métro m'a semblé se transformer en monde sous-marin, ce qui m'a fait penser à l'île d'Atlantide.

Je prévois également de photographier avec la LomoChrome Metropolis. Je pense qu'elle offrira des résultats intéressants.

Crédits: Nikita Parnyuk

As-tu vécu une expérience mémorable et intéressante en travaillant sur tes photos ?

J'ai envoyé un e-mail au métro de Moscou pour leur dire que j'avais énormément de photos que je voulais montrer aux gens. Sans m'attendre à quoi que ce soit, j'ai été surpris lorsqu'ils m'ont proposé d'organiser ma propre exposition et m'ont même donné l'occasion de photographier des trains électriques à la gare.

Selon toi, à quel point ton identité personnelle — tes émotions, ta philosophie — se reflète dans tes photos ?

Je pense que toute oeuvre d'art est le reflet des profondeurs de la psyché de son auteur. Ayant étudié le concept d'espaces liminaires, je n'ai pas été surpris par mon choix d'en faire mon style principal. À vrai dire, je suis une personne anxieuse et je lutte avec ma santé mentale depuis bien longtemps. Je pense que le contraste entre la lumière et l'ombre, ainsi que la perspective du cadre qui s'éloigne – présents dans la plupart de mes photographies – symbolisent mon parcours de l'obscurité à la lumière. Du moins, c'est ce que je choisis de croire.

Crédits: Nikita Parnyuk

Y a-t-il un projet ou un thème que tu envisages d'explorer prochainement en photographie ?

J'aimerais m'intéresser davantage à la ville nocturne, aux lumières des lanternes du soir et aux romances de route. J'aimerais aussi publier mon propre magazine en ligne.


Merci Nikita pour cette interview ! N'hésitez pas à consulter son Instagram et son site pour en découvrir plus sur son travail sur les espaces liminiares.

écrit par francinegaebriele le 2025-07-23 dans #équipement #Gens

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