Community Amigo : gwe-gwenaelle

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Gwenaëlle alias @gwe-gwenaelle est une passionnée, et c'est peu de le dire. De son rapport sensuel à la photographie à sa collection d'appareils, découvrez-en un peu plus sur cette nouvelle-venue dans la famille des Community Amigos !

Nom : Gwenaëlle
Lomohome : gwe-gwenaelle
Ville : près de Rennes
Age : 40 ans

Une photo de moi que j’aime bien, prise par mon père dans notre salle de bains, avec le même Praktica que j’utilise.

Salut ! Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur toi ?

Salut ! Je viens de Lorraine, pas loin des Vosges, je suis passée par Nantes, Paris, la campagne angevine, et cette année je viens de m’installer en Bretagne. Je voulais me rapprocher de la mer et de la forêt de Brocéliande (potentiels sujets très excitants à photographier !). J’ai fait mes études et j’ai un peu travaillé dans le cinéma (j’écris toujours), et ça reste ma passion première, mais j’ai dû faire plein de petits boulots alimentaires, principalement dans l’agriculture, ce qui a hypersensibilisé mon rapport à la nature. Je viens de reprendre mes études pour travailler dans le domaine du paysage, ce qui me laisse peu de temps en dehors, mais chaque session de promenade photographique est une vraie bouffée d’air.

Depuis combien de temps es-tu Lomographe ?

Au printemps dernier, plein de choses se sont passées qui m’ont donné envie de me remettre à la photo argentique, que j’avais laissé tomber depuis plusieurs années. Je n’avais plus un boîtier correct, j’avais l’impression que le matériel argentique n’était plus accessible, et j’étais agacée par la prolifération des photos prises au numérique. J’adorais faire des portraits pendant les fêtes de famille, mais quand deux ou trois oncles prennent 150 photos chacun dans la journée et qu’on va passer toute la fin de l’après-midi à les regarder, ça n’a plus aucun intérêt. J’ai senti vraiment le besoin de refaire de la photo à l’été 2015, quand j’ai pu partir en vacances au bord de la mer, mes premières vacances depuis plusieurs années. La pratique de la photo a beaucoup à voir avec ce sentiment des vacances, l’envie de retenir le temps, de capturer les bons moments. Il y a toujours une part de « saudade » dans les vacances, et dans la photo. Donc j’ai commencé à me rééquiper pour pas cher (je n’ai aucun appareil sophistiqué),

J’ai retrouvé un boîtier exactement identique à celui avec lequel j’ai commencé la photo. J’avais des amis qui possédaient des Lomo donc je suis allée fouiller de ce côté-là et j’ai découvert une mine d’or de petits appareils. Et c’est très enthousiasmant, ce revival de l’argentique, ça permet qu’on fabrique encore des tas de pellicules que je croyais disparue à tout jamais (de la 3200 NB, par exemple, je pensais que c’était devenu introuvable). En parallèle, étant une fan de vieilles photos d’amateur (ma référence étant le livre « Photo trouvée » de Michel Frizot et Cédric de Veigy) que je traque dans les vide-greniers et qui peuvent avoir un pouvoir émotionnel très fort, j’ai commencé à acheter également de vieux appareils photo. Mon grand plaisir est de récupérer des vieux coucous qui ont servi de presse-livres pendant des décennies, et de les refaire fonctionner en essayant de se fondre dans le « style » de l’appareil, pour essayer de restituer des photos ayant le même pouvoir émotionnel.

Et puis, que ce soit avec les Lomo ou avec ces vieux appareils, ce qu’il y a de plus excitant, c’est qu’il y a une part d’aléatoire, d’erreur, de défauts, et c’est à chaque fois de la valeur ajoutée à la photo. Donc, pour répondre quand même succinctement à la question, j’ai commencé à m’équiper en appareils Lomo seulement au printemps, et j’ai crée mon LomoHome en été (mais une partie des photos date de plusieurs années déjà). Ça me fait d’autant plus plaisir d’avoir été élue « LomoHome de la semaine » parce qu’à côté de certains vieux briscards prolifiques et très très doués du site, je suis un nourrisson.

Une autre photo fétiche que j’ai prise avec un jetable panoramique et que j’associe aussi avec un souvenir très fort, une période assez pénible où les photos étaient mon oxygène.

Quels sont les appareils photo que tu possèdes ?

Il y a d’abord mes appareils « historiques » : un Praktica PLC2 (ex-RDA) des années 70, le Reflex avec lequel j’ai débuté, et puis un Fed 3b, un appareil télémétrique des années 60, une copie soviétique des Leica que j’ai acheté à Moscou en 1993 (qui est comme neuf et qui sent merveilleusement bon le cuir). J’ai aussi un Polaroid que j’ai aussi pu ressortir cette année quand j’ai appris qu’on pouvait à nouveau trouver du papier compatible ! Ensuite, il y a les vieux appareils que j’ai chinés. J’ai un Voigtländer Bessa de 1929, un appareil à soufflet, dont la mécanique marche parfaitement ; un Photax III VA de chez MIOM de 1955 (une marque française, un appareil tout en bakélite, avec un objectif rétractable) ; deux Kodak Brownie, un de 55 en 620 et un autre de 65 en 127 ; un SEM « Joie de Vivre » 4,5 de 1959, un Reflex TLR très agréable à utiliser ; et enfin un Agfamatic 100 Sensor de 1971, que je n’ai pas encore utilisé parce qu’il mange des cartouches 126 (qui est format 24x36 conditionné dans une cartouche comme la 110 – il faut que je le bricole un peu). Par deux fois j’ai trouvé des pellicules à l’intérieur qui n’avaient pas encore été développées, et c’est aussi excitant que de trouver une esquisse de Van Gogh dans un vieux registre de commerce (enfin presque).

Pour ce qui est des Lomo, j’avais déjà 2 Toy Cameras type « action sampler » à 3 et 4 poses ; j’ai trouvé un Holga 120 avec flashs colorés, un Holga 135 Pinhole ; et j’ai un Diana Mini, un Fisheye No. 2 avec caisson étanche, un Sprocket Rocket, un Oktomat, et une Sardina 8 ball.

Une série de portraits de famille avec le Voigtländer Bessa de 1929. Comme dirait mon père, « c’est flou ».

Et puis enfin côté caméra, je me suis offert à l’aide de quelques Piggies la Lomokino qui est également très excitante : enfin les fauchés peuvent faire des films argentiques ! J’ai toujours une caméra Super8 dont je me resservirais peut-être un jour, et puis je suis assez fière d’avoir déniché une caméra 16 Paillard Bollex, avec sa monture 3 objectifs, dans une sacoche pleine d’accessoires. Et qui marche parfaitement.

A côté de ces appareils, il y a aussi plein de pellicules qui m’intéressent beaucoup et que je suis en train de tester, comme la Cinestill ou la Color Implosion. J’aime bien aussi travailler avec des pellicules périmées, ça ajoute une couche de plus à l’aléatoire. Tous mes appareils sont chargés, j’en prends quelques uns à chaque ballade, je fais une ou deux photos (l’argentique est un ascétique, en comparaison de ce boulimique de numérique), donc il me faut plusieurs mois pour finir une pellicule et avoir le résultat. On a presque oublié ce qu’on avait pris. C’est bien. Mais je ne veux pas dénigrer le numérique non plus, je m’en sers aussi. Seulement, c’est autre chose.

Peux-tu nous raconter ton expérience avec eux ?

Sur mon Praktica, j’adore le « klonk » sonore au déclenchement. Les appareils plus sophistiqués travaillent à un bruit le plus discret possible, moi j’aime bien que les gens soient au courant quand je les prends en photo. J’ai remarqué qu’en photographie animalière, les animaux tournent la tête vers mon objectif, je peux obtenir de beaux regards caméras. J’ai un rapport vraiment sensuel avec les appareils, comme je l’ai dit, j’adore l’odeur de cuir de mon Fed, l’odeur chimique des pellicules. Le Praktica est le seul appareil que j’ai avec cellule et plusieurs objectifs, aussi je m’en sers pour les photos les plus composées, recherchées. Évidemment, l’intérêt des appareils Lomo est qu’on peut les avoir dans un sac partout avec soi et qu’on a simplement à le sortir et à déclencher, sans même viser parfois. Et en général ils sont plus intéressants quand il y a de la vie devant soi, du mouvement, des gens, des amis. Ce sont vraiment des appareils « sociaux ».

Pour mes vieux appareils, j’ai adoré travailler avec le Voigtländer Bessa de 1929. Il était un peu moisi, les soufflets étaient décollés, j’avais colmaté les trous comme j’avais pu avec du scotch noir. J’ai pris en photo ma famille cet été, et le dispositif a tout de suite entraîné une grande solennité dans la pose. Il fallait que j’installe le pied, que je mesure la lumière, que j’estime la distance à l’œil (je me suis un peu ratée d’ailleurs là-dessus). J’ai disposé des chaises pour qu’ils s’assoient (un peu au pif parce que je ne voyais rien dans le viseur). Les modèles ont tout de suite le sentiment qu’il se passe quelque chose de particulier, d’autant plus que j’étais en vitesse lente et que je leur demandais de ne pas trop bouger. Il s’est passé que le scotch n’a pas été très efficace pour réparer les soufflets, et que quand l’appareil était posé en plein soleil, j’ai obtenu de gros flares blancs, ectoplasmiques. J’adore ! Et même si j’ai un peu cafouillé dans les réglages, il se passe quelque chose.

Mes deux portraits préférés. Ils ont été pris par Nadar (Sarah Bernhardt et Pierre Savorgnan de Brazza).

Quel est ton appareil Lomography préféré ? Pourquoi ?

Je suis très contente d’avoir trouvé le Sprocket Rocket. Je m’étais éclatée il y a une dizaine d’années avec des appareils jetables panoramiques, avec lesquels j’avais obtenu de très belles photos dans les marais salants à Guérande. J’en cherchais partout depuis, vainement. J’ai mis une pellicule Redscale dedans, je vais aller chercher le soleil au bord de mer, j’ai hâte de la finir (mais le temps que le soleil revienne…). Je crois qu’on va aussi bien s’amuser avec l’Oktomat à la prochaine fête de famille (j’ai plein de cousins qui ont eu plein d’enfants… donc ça bouge de partout), à faire les zouaves en mouvement. On n’est vraiment pas loin du cinéma, là. Mais pour mes prochaines vacances, je crois que l’appareil d’élection sera le Diana Mini. Il ne pèse rien en bandoulière, et ce petit format carré avec une définition moyenne, c’est exactement l’idée que je me fais des photos de touristes d’il y a cinquante ans. J’ai un peu essayé de retrouver ça pendant un séjour à Barcelone en juillet dernier, avec un Kodak Brownie Starluxe. L’ennui, c’est qu’il fonctionne en 127. On peut encore en trouver – difficilement – en NB, mais en couleur, c’est quasi-impossible. Et puis ce Brownie n’est pas très ergonomique et il y a un sacré bouger au déclenchement (ce qui peut donner de belles choses – mais des fois c’est juste moche). Le Diana Mini, en 35, va être parfait pour le remplacer. Il y a une autre chose formidable, à se promener comme ça avec un Lomo ou un vieil appareil : ça intrigue considérablement les gens, ça les fait sourire, et c’est une super manière d’engager la conversation avec des inconnus, ou de se reconnaître entre « argentiquo-addicts » !

A ton avis, pourquoi on continue de faire de l’argentique ?

Comme je le dis, il y a toujours un énorme capital sympathie pour l’argentique, on continue à l’associer aux jours heureux, aux vacances, et à nos chers disparus. Chacun de nous est tombé en arrêt sur des photos de nos grands-parents ou arrière grands-parents en se disant : « comme ils étaient beaux ! ». Il y a aussi, bien sûr, un effet de mode « vintage », comme pour le vinyle. Je suis assez vieille pour avoir connu les clubs photo au lycée, avec le labo tout en carrelage où on allait faire des tirages. Voir tout-à-coup l’image apparaître sur le papier dans la cuve de révélateur, c’est une expérience qui tient de la magie, c’est inoubliable. Il y a une sorte de pouvoir « totémique » dans l’argentique, que ce soit en photo ou en film ; un jour, les rayons du soleil ont touché ce modèle et sont venus en retour imprimer cette émulsion, et qui par contact a imprimé une autre émulsion, puis une autre, puis une autre… Si je vais voir une projection argentique de « Gilda » au cinéma, il y a une petite poussière de Rita Hayworth qui arrivera jusqu’à moi.

J’ai eu une vraie émotion en découvrant le tirage de cette photo prise au Park Güell de Barcelone avec un Photax très joli mais vraiment pas pratique pour cadrer, et une pellicule Kodacolor II 620 périmée depuis 1977.

Quels sont les sujets que tu aimes photographier ?

Comme j’écris en exergue de mon LomoHome, « I don’t have any style, the camera has » (« je n’ai pas de style, c’est l’appareil qui en a »). Un appareil m’attire (ou un couple appareil + pellicule), et ensuite je cherche les sujets qui sont faits pour lui. Avec le Holga Pinhole, j’ai envie de paysages dans la brume, avec la Sardina, je vais me coller aux gens, avec le Fed je vais faire des photos de rue en noir et blanc. Mais je suis surtout attirée par les couleurs, les lumières particulières d’aube et de crépuscule. J’aime aussi beaucoup aller dans les musées, photographier des œuvres, ou dans les zoos, des animaux. On est totalement dans la contemplation, on est connecté au sujet, et on oublie totalement ce qu’il se passe autour. Je sors de ces sessions reposée et détendue comme après une bonne nuit de sommeil. Et puis, comme je le disais, j’ai repris des études de paysage, et je fais de plus en plus attention aux végétaux et à leurs compositions. Là, je me sers surtout de mon téléphone en numérique, comme un bloc-notes. Au travail, je ne pourrais pas me permettre de sortir un appareil-photo, je serais tout de suite cataloguée touriste. La phonéographie est mieux acceptée. Puisque tout le monde le fait.

Tu peux nous parler des photos que tu as choisi de nous montrer ?

J’avais envie de vous montrer quelques photos trouvées que je n’ai pas mis sur le site. Elles dégagent quelque chose, elles me donnent envie d’écrire une histoire :

Une photo que j’ai fait développer à partir d’une bobine retrouvée dans un appareil des années 60 :

Et puis il y a, comme je le disais, de vieilles photos de famille, où tout le monde était beau :

Et dernièrement, j’ai retrouvé la sensation du Technicolor avec mon Sem bi-objectif et une pellicule 120 Kodak Portra :

Ça, ce n’est que le début, et j’ai hâte de finir toutes mes pellicules commencées dans mes différents appareils Lomography. Et les faire partager.

Des LomoHomes que tu aimes suivre ?

Là encore, on est dans le domaine de la fouille et de la chasse aux trésors, je pourrais y passer des heures ! Je suis tombée sur la page de @grazie qui photographie très bien la nature et les végétaux (ça doit être un truc de filles). En faisant des recherches sur le sténopé, je suis tombée sur la page de @lebedev et de @notabene. Et j’avais aussi découvert la page de @lafilledeer en faisant une recherche sur l’appareil-photo SEM, qu’elle utilise aussi. J’aime bien faire des recherches par tag pour voir les possibilités d’un appareil ou d’une pellicule. Tous ces gens sont de très grosses pointures qui sont habités, voire dévorés par la photographie. Et ils dévorent le monde. Mais en bien. Pour résumer, ce sont donc des dévoreurs ascétiques, les seuls dévoreurs à ne pas détruire ce qu’ils bouffent, mais à l’intensifier.

Merci Gwenaëlle !

écrit par Théo Depoix-Tuikalepa le 2016-11-28 dans

3 commentaires

  1. olivier_g
    olivier_g ·

    C'est vrai que, l'aspect vintage et décalé des appareils argentiques intrigue... Lors de soirées, j'amène souvent mon "La Sardina" muni de son flash... et bien... ça fait son effet.

  2. lafilledeer
    lafilledeer ·

    :)

  3. astonuts
    astonuts ·

    Excellent !

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