De lignes et de béton : Jules Garnier et le Lomo'Instant Wide

La ville est le terrain de chasse favori de Jules Garnier. Voilà plusieurs années que le jeune photographe basé à Paris braque son objectif sur des tours et des bâtiments aux allures brutalistes. Pour cette série, c'est le Lomo'Instant Wide qu'il a embarqué avec lui. En résulte cette série graphique, de lignes et de béton.

Salut Jules ! Est-ce que tu peux te présenter à la communauté Lomography ?

Bonjour ! Je m'appelle Jules Garnier, j'ai 28 ans et vis à Paris. La photographie est mon métier et ma passion.

Quel est ton parcours ?

Je suis né et j'ai grandi en banlieue parisienne, dans ce qu'on appelle les "cités". J'ai d'abord étudié les sciences politiques puis la communication avant d'en faire mon métier, puis de tout lâcher pour la photographie. Et je ne regrette pas !

Pourquoi et comment t’es-tu mis à la photo ? Qu’est-ce qui t’a attiré vers cette pratique ?

Jusqu'à l'âge adulte, je n'avais jamais vraiment découvert la photographie. Mes parents n'avaient pas d'appareil photo, mes amis non plus. J'étais de la génération des débuts du numérique, la photographie était dans une sorte de "trou qualitatif", entre désintérêt pour l'argentique et numérique encore balbutiant.

Puis ma copine m'a offert un Diana F+ à Noël. Pour faire fonctionner ce genre d'appareil, on est un peu obligé de s'intéresser aux règles de la photographie : l'exposition, la mise au point... Le virus a pris, je suis entré dedans à 100%. J'ai adhéré à une association photo, ai fréquenté les labos et j'ai finalement tout quitté pour en faire mon métier.

Plutôt numérique ou argentique ? Pourquoi ? Parle-nous de ta collection d'appareils.

Les deux ! J'ai parfois écrit : "digital to work, analogue to speak". Aujourd'hui, pour travailler en photographie, on est pratiquement obligé de travailler en numérique. Notamment parce que c'est rapide. Les clients veulent souvent les photos pour le lendemain. Ce serait impossible en argentique. On maîtrise aussi beaucoup mieux le résultat, c'est plus souple, il y a plus de sécurité. C'est ce qui fait la force du numérique mais aussi sa faiblesse. En argentique, on maîtrise beaucoup moins le résultat. On shoote moins, on tâtonne, on cherche. Les photos prennent alors un côté beaucoup plus authentique, intime. C'est pourquoi lorsque je photographie pour moi même, je shoote toujours en argentique.

Comme je suis un passionné, j'ai une ribambelle d'appareils de toutes les époques. Je passerai sur les boîtiers numériques car, franchement, on a tous la même chose aujourd'hui : un Canon 5D ou un Nikon D800. En argentique, mes appareils correspondent un peu à mes usages : en voyage, j'emmène toujours mon Nikon F-801s et son Nikkor 50mm 1,8. C'est fiable, léger, peu onéreux, ça expose bien, il y a même l'autofocus ! J'adore ce boitier parce que je fais de la diapositive en voyage. Quand on fait de la diapo, il faut toujours que ce soit bien exposé et le F-801s est le meilleur pour ça. J'emmène aussi un Nikkor 135mm 3,5 que j'adore pour sa compacité et son bokeh. Les optiques des années 80 ont ce côté "velouté" que j'aime beaucoup.

Pour la photo de rue, j'utilise le Minox 35. C'est un des plus petits appareils argentiques au monde ! Ce que j'aime avec lui c'est sa taille forcément, son optique de 35mm de fabrication allemande et sa philosophie de construction. Car avec cet appareil, on est obligé de photographier à l'hyperfocale et de viser au hasard. Parfait pour la photo instinctive, donc. Pour les portraits, j'ai un Lomo Lubitel 166 d'époque étonnant de qualité pour son prix et un Mamiya 645S mais je l'utilise assez peu.

Voici pour les principaux ! Avec l'argentique, il suffit parfois de changer de boîtier ou même de pellicule pour entrer dans une dimension complètement différente. J'adore !

Tu as réalisé cette série de photos au Lomo'Instant Wide. Qu’est-ce que tu en as pensé ? Comment s'est passée sa prise en main ?

C'est simple, c'est bien pensé et surtout, pour un "polaroid" moderne, c'est plutôt beau. J'adore le fait qu'on puisse débrayer le flash, c'est un gros avantage. Et le fait de pouvoir compenser l'exposition et donc choisir de sur ou sous exposer ça c'est génial. Mention spéciale également pour la possibilité de faire des multi-expositions à loisir. Qui fait des multi-expositions aujourd'hui en numérique ? Plus personne. Vous voyez tout l'intérêt de l'argentique : la créativité.

Où es-tu allé promener notre instantané format wide ? Raconte-nous le déroulement du shoot.

Je suis allé en Saine-Saint-Denis, dans mes cités préférées. Au départ, j'étais un peu foufou. Le Wide a plein d'options que je viens de détailler et j'avais envie d'un peu tout essayer. En faisant cela, je me suis un peu perdu et j'ai perdu de vue le coeur de mon travail. Ma première série n'était vraiment pas terrible. J'ai donc décidé de me concentrer sur mon travail, mes méthodes. Je suis allé à Bobigny, dans le centre ville que j'affectionne pour son architecture très soviétique, avec beaucoup de bâtiments en béton très imposants. Et là j'ai adoré shooter au grand angle, avec ce petit vignetage dans les coins. J'étais satisfait.

Au regard de ton travail photographique, la ville et son paysage semblent être tes sujets de prédilection. Mais à y regarder de plus près, c'est davantage la thématique de la banlieue et du logement que ton travail soulève. Pourquoi cet intérêt pour l'architecture et les motifs urbains périphériques ?

J'ai un sentiment très ambivalent vis à vis des "cités"' qui sont effectivement l'objet principal de mon travail. J'y ai grandi et pour être franc, je n'aimerais pas y retourner. Mais j'y retourne, encore et encore. Je peux dire pourquoi j'y vais, pourquoi je choisis de montrer cet immeuble plutôt qu'un autre. Mais je n'ai pas encore répondu à la question profonde qui explique pourquoi je m'y intéresse autant. Je cherche encore.

Comment considères-tu cette démarche : s'agit-il d'une forme d'abstraction, d'un jeu purement graphique avec les lignes et les formes ? Ou bien te poses-tu en tant que témoin, te rapprochant ainsi du reportage, voire d'une certaine forme d'engagement ?

Je crois que j'ai voulu aborder la banlieue sous l'angle du design. Quand on parle des cités, on parle souvent de leurs habitants avec un angle très social. J'ai voulu sortir un peu de ces approches pour me concentrer sur le design. Regardez dans les autres pays. Qui, à part Brasilia et les pays de l'ex bloc de l'URSS, a des immeubles aussi design ? Signés par de grands architectes, aussi résolument modernes ? Ce que j'aime aussi, en plus de leur design complétement fou, c'est que ces immeubles ont vécu. Il ne sont pas beaux comme au premier jour. Ce n'est pas la cité radieuse de Le Corbusier à Marseille avec ses couleurs éclatantes et ses habitants souriants. Ces immeubles ont des cicatrices, des marques, des traces de vie. Ils sont authentiques.

Pour quel genre de projet recommanderais-tu le Lomo'Instant Wide ? Et avec quels conseils ?

Pour moi, le Wide convient parfaitement aux amateurs d'architecture et de portraits. Pour l'architecture, je conseillerais de privilégier le grand angle et peu d'effets. En revanche pour le portraits, je conseillerais de tester au maximum les multi expositions, le flash dans toutes les conditions etc.

D'ailleurs, tu travailles sur quoi en ce moment ?

Je fais une pause. Cela fait des années que je travaille sur les cités et j'ai besoin de laisser ce sujet de côté. Mon intérêt pour la diapositive grandit de jour en jour et je shoote beaucoup de voyages comme ça. Pour moi, le rendu des couleurs et des reliefs de la pellicule diapositive sont inégalés, même en numérique. Je pense aussi me concentrer sur la photo de rue à l'avenir, mais je n'ai pas encore décidé comment. Le sujet est un peu à la mode depuis quelques années, cela me fait un peu peur.

Un dernier (lo)mot ?

Ne vous laissez pas décourager par les photos floues, les pellicules ratées, les cadrages aléatoires. Il suffit d'une photo sur 1000 pour être satisfait. D'une seule photo pour exprimer ce que vous vouliez dire. C'est énorme.

Merci Jules !


Retrouvez le travail de Jules sur son site et son compte Pictagram.

écrit par Théo Depoix-Tuikalepa le 2016-10-13 dans #équipement #lieux

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Lomo'Instant Wide

Lomo'Instant Wide

Nous sommes très heureux de vous présenter le Lomo'Instant Wide — l'appareil instantané au format wide le plus créatif au monde ! Combinant un savoir-faire de haute volée avec des fonctionnalités polyvalentes, le Lomo'Instant Wide est l'appareil photo instantané pour tous ceux qui veulent capturer chaque beau moment, bizarre ou déconcertant de façon créative en grand angle et de manière nette et parfaitement exposée.

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