LomoKino Amigo : un moment de cinéma avec Dominik Lange

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Sortez vos lunettes 3D, car vous allez découvrir un univers “LomoKinotographique” de dingue ! Faites la rencontre de l’artiste cinéaste Dominik Lange à qui l’on doit le film en 3D intitulé Lomokino Greenhouse Stereo. Dans cet interview, il vous parle de la création d’un film en relief stéréoscopique, et des anaglyphes. Prenez des notes et inspirez-vous ! La photographie en mouvement est en marche ! Passionnés de Super 8, c’est le moment d’en apprendre encore plus !

Nom : Dominik Lange
Vimeo : lange
Appareil : LomoKino

Bonjour Dominik ! Nous sommes très heureux de t’accueillir sur notre site ! Est-ce que tu pourrais te présenter à notre communauté ?

Bonjour, je suis un artiste indépendant abordant divers domaines d’expression libre, dont essentiellement le cinéma,la photographie, la musique et l’écriture, et je vais bientôt suivre une formation d’ouvrier jardinier paysagiste, à temps plein durant les mois qui viennent, en vu de retrouver un emploi rémunéré !

Pourrais-tu nous raconter ton histoire avec la photographie argentique et avec le cinéma ?

Pour autant que je me souvienne, j’ai dû commencer sérieusement la photographie vers l’âge de quinze ans, à l’occasion de voyages d’échanges scolaires en Allemagne et en Espagne, avec l’appareil compact Agfa de ma mère, puis l’appareil reflex Pentax plus professionnel de mon grand-père paternel, qui était lui-même photographe historien régionaliste spécialiste de l’époque romaine de la ville de Trèves en Rhénanie …
Le cinéma m’as toujours fasciné depuis mon plus jeune âge, je me rappelles même de certaines scènes un peu surréalistes, fantaisistes ou fantastiques vues au cinéma, de films mettant en scène le fameux comique français bien connu Louis de Funès, alors que je n’avais que cinq à peine !
J’ai également fait vers mes vingt-cinq ans une école de cinéma à Paris, le Conservatoire Libre du Cinéma Français, en abrégé C.L.C.F., une école privée qui existe toujours du reste sur le quai de l’Oise à Paris, mais je déconseille aux amateurs les écoles de cinéma quelles qu’elles soient, elles ne débouchent vraiment sur aucun emploi possible à terme, à moins d’avoir pour soi une vocation à suivre un parcours de technicien calibré selon les normes industrielles, et de ne manifester aucunes vocations artistiques pour son compte personnel !

En septembre, tu as présenté au musée de l’Éternelle un film 3D intitulé Lomokino Greenhouse Stereo ? Est-ce que tu pourrais nous parler de ce projet techniquement fou ?

C’est en effet ma dernière tentative en date de réalisation d’un film en relief stéréoscopique, au moyen de l’appareil photo Lomokino, selon une technique déjà ancienne de prises de vues stéréoscopiques à la volée dite « Cha-Cha-Cha », puisqu’elle s’inspire d’un pas de danse sur le côté en quelque sorte, les paires d’images gauche puis droite, constitutives des vues stéréoscopiques, sont prises séquentiellement en alternance gauche et droite au pied dansé justement !

Après numérisation des photogrammes au smartphone et à la visionneuse à manivelle de Lomokino, les images sont ensuite converties en planches dites anaglyphes avec un logiciel de traitement adéquat, en l’occurrence ici un logiciel libre open source et gratuit, puis animées en un flux continu, afin de réaliser la séquence animée, cette fois-ci avec un logiciel de montage ordinaire du commerce, ce qui représente tout de même quelque trois ou quatre heures de travail par jour, pendant un mois entier devant mon écran d’ordinateur, afin de finaliser ce film stéréoscopique de dix minutes, composé de seulement 777 photographies au format Super 35mm au départ !

L’expérience du film est assez indescriptible, puisque c’est déjà une expérience en soi à traverser, et de tenir ainsi jusqu’au bout des dix minutes de sa projection en relief, en acceptant de se laisser captiver, de s’immerger et de se perdre pendant la contemplation des images en mouvement, qui représentent figurativement des plantes tropicales en serres au Jardin des Plantes de Paris, mais peut-être également ici la transformation du regard chez le spectateur ?

Serres d’Auteuil Anaglyphe 2/2 de Dominik Lange

Peux-tu nous expliquer en quoi consistent les anaglyphes ? Et comment tu as réussi à en faire avec l’appareil ?

Le procédé dit anaglyphe est une invention française contemporaine des premiers temps de la photographie qui date déjà de la fin du XIXème siècle, qui permet de restituer une impression en relief à partir des vues d’images stéréoscopiques, pour lesquelles les paires d’images ne sont pas disposées classiquement côte à côte, comme c’est le cas avec les très anciennes visionneuses binoculaires traditionnellement destinées à la consultation des plaques photographiques stéréoscopiques, mais superposées cette fois-ci l’une sur l’autre, les images stéréo sont alors codées puis filtrées par un jeu de couleurs complémentaires, classiquement le rouge et le cyan par exemple, qui permet à chaque œil de ne recevoir strictement que l’image de la paire stéréo qui lui est destinée, et au final de synthétiser mentalement l’impression du relief en volumes dans la perspective de l’espace chez le spectateur …

Côté technique, quelles difficultés as-tu rencontrées ?

En toute franchise j’avouerai que le maniement du Lomokino, bien qu’intuitif et très aisé au départ, n’est pas si évident, dès lors que l’on souhaite affiner un peu plus de précision au niveau du cadrage surtout, éviter un flottement et tangage excessif du cadre de l’image une fois convertie dans sa version cinéma, la solution la plus courante étant alors de fixer l’appareil sur un trépied et d’actionner calmement la manivelle en toute stabilité. Mais pour ma part je ne suis pas un fan des trépieds et autres tripodes en photographies, j’aime particulièrement la liberté des mouvements, et la spontanéité du regard en prises de vues. J’ai donc stabilisé au mieux le cadrage du Lomokino en m’aidant d’une prise en main ferme, d’un bon appuis frontal , et en actionnant calmement la manivelle, jamais au-delà des trois images à la secondes …

Concert ! de Dominik Lange

La photographie devient entre tes mains un véritable mouvement. Pourrais-tu nous parler un peu de cette esthétique que tu développes avec tes films ?

Je réalise des films dits expérimentaux depuis 1999, tout d’abord en format de films Super 8mm, puis 16mm avec une caméra amateur de la marque suisse Bolex, et même Super 35mm avec Lomokino ! L’avantage indéniable de ces caméras films mécaniques, c’est de pouvoir naviguer en effet à la frontière entre la photographie et le cinéma, de pouvoir actionner manuellement le déclencheur, et de réaliser ainsi une suite animée à même la prise de vue, dans ce dernier cas dite classiquement en « stop motion », un procédé qui manipule des objets réels en animation, par opposition à la CGI (computer generated imagery) ou imagerie de synthèse, qui génère des objets virtuels en partant de la page blanche de l’écran d’ordinateur. Tout cela pour dire combien la prise directe avec le réel est importante et stimulante chez moi, c’est une contrainte matérielle nécessaire à mon inspiration, bien que je ne réalise pas de films documentaires à proprement parler …

Gif, cinématographe, argentique… Est-ce que les images animées, à mi-chemin entre la photographie et le cinéma, pourrait remplacer nos bons vieux albums photos ?

Je pense que c’est déjà le cas sur la plupart des forums d’échanges et autres réseaux sociaux virtuels du web ! Les images en gif animées de manquent pas, bien qu’elles pourraient se généraliser davantage encore, s’il y avait davantage de logiciels du commerce ou d’aides à la création et à l’intégration de ces gif animés justement, sans nécessiter aucunes connaissances au préalable en langages de programmation, à la destination des néophytes et de leurs publications spontanées dans leurs blogs respectifs et autres pages d’écritures sur le web …

Si le LomoKino pouvait être utilisé par le réalisateur de ton choix, qui choisirais-tu ?

Ah là là c’est un peu difficile cette question-là ? Je pense qu’elle reviendrai à se demander de nos jours, pour rester pertinent à ce sujet-là, quels seraient les réalisateurs de cinéma de nos jours, qui affectionneraient encore l’esthétique du rendu d’image, irremplaçable par sa texture particulière et sa matérialité visuelle quasi palpable, des supports de films photochimiques ? A mon avis ils seraient encore nombreux, pour peu qu’ils aient conservé une certaine acuité et sensibilité du regard, qui n’est somme toute qu’une affaire d’éducation des sens et de culture il me semble ? Je n’ai pas de nom en tête ici à citer immédiatement, mais je suis sûr que Lomokino continuera quelque temps encore, aussi longtemps qu’il y aura de la pellicule 35mm à la disposition dans le commerce, de même que les artistes peintres continueront encore leurs achats de peintures acryliques en tubes à l’avenir !

Comment as-tu découvert le LomoKino ?

Il me semble que je cherchais au départ sur le web un appareil photographique pas cher et contemporain, qui me permette de réaliser des prises de vues stéréoscopiques en photographie, tout prêt à l’emploi et d’un prix abordable, et finalement mon choix s’est arrêté sur Lomokino dans la gamme des appareils de Lomography !

Lomokino Greenhouse Stereo de Dominik Lange

Qu’est-ce qui t’a motivé à tourner Lomokino Greenhouse Stereo avec l’appareil en particulier ?

Je crois que je n’ai pas résisté au désir de filmer au format de film Super 35mm, à la possibilité de filmer dans ce format en prises de vues image par image, le concept est tout à fait simple et génial en soi !

Le Super 8 est au cœur de ton art. Pour quelles raisons as-tu choisi de te tourner vers ce type de caméra ?

Sans doute pour les même raison que pour le Lomokino, à savoir l’interaction alchimique en prise directe avec le réel, la possibilité d’actionner mécaniquement la caméra, de laisser émerger la possibilité d’incidents mineurs de l’image,qui ne peuvent survenir que par ce biais physique, celui de la matérialité de la pellicule qui laisse la place au hasard, aux pannes éventuelles, aux expositions aléatoires, aux événements non prévisibles qui seraient immédiatement lisibles sur un écran de contrôle vidéo, et donc censurés par notre mémoire visuelle immédiate ?

Zombi-jardin de Dominik Lange

Aurais-tu des astuces à donner pour les heureux propriétaires du Lomokino ?

De prévoir éventuellement un pied photo, ou bien d’acheter la poignée pour une somme modique en complément, ce qui permet de mieux stabiliser ses images, avec un bon appui sur la joue du boîtier, et de ne pas faire tourner la manivelle à toute vitesse non plus comme un malade ! Mais après tout pourquoi donc se restreindre techniquement, toutes les approches et toutes les expérimentations sont possibles n’est-ce pas ?

Des futurs projets derrière la caméra dont tu souhaiterais nous parler ?

Pour l’instant je suis dans une phase de réalisation de photographies stéréoscopiques semi- abstraites en mode B de temps de pause longue, et de light painting, mais non pas classiquement avec l’appareil photographique sur un pied et le photographe qui réalise ses graphes lumineux au devant dans la cadre de sa visée, mais avec l’appareil photo lui-même en mouvement qui me sert de bombe aérographe en quelque sorte, les sujets lumineux et autres reflets de lumières dans le décors photographié étant fixes à proprement parler …

LomoKino, ça rime avec … ?

L’homo sapiens ? L’ultime étape de l’avenir de l’humanité ? Ou bien l’homme à la caméra tout simplement ?

*Merci beaucoup Dominik pour ton temps et pour cette belle leçon technique ! On ne doute pas que ton travail va inspirer notre communauté. *

écrit par mpflawer le 2015-12-14 dans #Gens #vidéos

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