LomoAmigo Petzval 85 : Mathieu Claudon

Aujourd’hui, c’est au tour du photographe et skateboarder Mathieu Claudon de vous emmener avec lui à bord de sa planche pour un petit tour sur les spots de Skateboard parisiens. Dans son sac à dos : le Petzval. So let’s take a ride !

Hello Mathieu! Est-ce que tu peux te présenter et nous parler un peu de ton parcours?

J’ai 38 ans, et pour résumer je suis un skateboarder qui fait de la photo, de skate, essentiellement.

Comment en es-tu venu à faire de la photographie ? Peux-tu nous raconter ton histoire avec cette discipline ? Ton premier appareil ?

Quand les reflex numériques sont devenus accessibles au grand public en fait. Il y a un peu moins de 10 ans. Mon ami Jeff s’était acheté un Nikon D70, il m’a demandé de le prendre en photo. Le premier cliché était bon, j’ai accroché direct ! Quelques mois plus tard je m’achetais le même. J’ai commencé à l’emporter à chaque session, partageant mon temps entre le skate et la photo. Et petit à petit je me suis mis à faire de plus en plus de photos et un peu moins de skate.

Et le skate. Tu es tombé dedans comment ?

En 1988. Suite à un déménagement. Je me suis retrouvé dans une petite ville de Normandie où je ne connaissais personne. En trainant à la maison de la presse locale je suis tombé sur mon premier magazine de Skate : « NOWAY ». J’y ai découvert tout un monde, une culture, des images… C’est devenu une passion pratiquement instantanément.

A quel moment tu as décidé de croiser ces deux disciplines ? Et pourquoi ?

Cela s’est fait très naturellement. Le skateboard est une discipline qui demande un certain engagement physique. Avec l’âge et les responsabilités professionnelles et familiales, je n’avais plus vraiment le droit de me faire mal. Cela peut devenir assez frustrant car à force de ne plus progresser on finit par régresser. Et pourtant j’aimais toujours autant le Skateboard et il était hors de question d’arrêter.
La photo m’a donc permis d’évoluer dans ma passion, de lui donner un nouveau sens, en revenant aux sources de celle-ci en quelque sorte. J’ai découvert ce qui allait devenir ma vie par les photos des magazines, aujourd’hui je produits mes propres images. C’est une bonne manière de boucler la boucle.

Tu bosses exclusivement en noir et blanc. Peux-tu nous expliquer ta démarche et ce choix en particulier ?

Les clichés qui m’ont le plus marqué en skateboard sont des clichés en noir et blanc. J’aime le noir et blanc, les clichés très contrastés qui vont à l’essentiel. Je trouve ça plus percutant. C’est donc venu rapidement comme une évidence et une manière de donner une unité à mon travail.

Est-ce que tu peux nous parler de ton livre Paris, Skate in the City et de la genèse de ce projet sur lequel tu as travaillé avec Etienne Bouet ?

J’ai rencontré Etienne alors qu’il était en train de terminer son premier livre « Skateurs Ordinaires » (Cameda Editions ISBN 978-2-9544092-0-7). Son éditeur l’a lâché à quelques semaines de l’impression, il a donc fait le tour des maisons Parisiennes pour placer son manuscrit. Il a eu un bon contact chez Eyrolles. « Skateurs Ordinaires » ne correspondait pas à leur catalogue, mais ils cherchaient depuis un moment à faire un livre sur le Skateboard et si Etienne revenait avec un projet ils étaient prêts à en discuter.
Etienne connaissait mes photos, il m’a appelé immédiatement. Il fallait donc trouver une idée, une bonne idée, un truc qui n’aurait pas déjà été fait et refait et surtout quelque chose de réalisable demandant le moins de moyens possibles.

Je voulais faire un livre de photos de skateboard, mais pas forcement que pour les Skateboarders, pas un livre de photos de sport en fait.
Une fois que l’on a réussi à poser tous ces éléments à plat, tout s’est mis en place assez vite.
Paris, elle était là l’idée maîtresse. Notre terrain de jeu quotidien et la ville la plus touristique du monde, on ne pouvait pas se tromper !

La question bête à -1 milliard : est-ce que le titre c’est un clin d’œil à :

Réponse A Sex in the City
Réponse B In the City par Chromatics
Réponse C In the City par Joe Walsh
Réponse D je divague complétement ?
Réponse A. Coupable votre honneur !

Dans le titre il nous fallait « Paris » et « Skateboard », quelque chose qui passe aussi bien en France qu’à l’international… C’est venu comme une blague, mais ça fonctionnait bien, on l’a donc gardé.

Vous proposez une cartographie parisienne des spots de skate tout en nous faisant rencontrer des anonymes et des personnalités du milieu. Peux-tu nous parler un peu plus de cette approche particulière ?

Nous voulions un découpage clair et cohérent en lien direct avec la ville, utiliser les arrondissements était donc une évidence tout comme le fait de mettre en avant les skateboarders locaux.
Ensuite nous avons cherché ce que nous pourrions apporter de plus pour donner une dimension internationale à l’ouvrage.
J’avais déjà en stock un certain nombre de portraits de Pros Américains que j’apprécie particulièrement. Mon ami journaliste, Fabrice Le Mao, était à Los Angeles avec la possibilité de réaliser des interviews. Nous avons donc décidé de placer entre chaque chapitre un portrait et un texte sur ces légendes de la discipline et leur rapport à Paris.

Le livre est préfacé par Raphaël Zarka, un artiste plasticien qui puise son inspiration dans le skate. C’est vous qui lui avez demandé ou la demande vient-elle de lui ? Peux-tu nous parler un peu de cette rencontre et de cette préface ?

Raphaël est un vieux copain. Nous nous sommes rencontrés il y a une dizaine d’années sur un spot de skate et nous avons vite sympathisé.
Quand la question de la préface s’est posée, j’ai immédiatement pensé à lui. Nous avons la même vision du Skateboard et je savais qu’il trouverait les mots pour exprimer le message que je voulais faire passer.

Et quel est ce « message » ?

Le fait que le Skateboard n’est pas un « sport », même si depuis maintenant dix ans les industriels du sport cherchent à récupérer notre industrie et à la remodeler pour la cantonner au coté « sportif » de la chose et ainsi la maitriser.
Le Skateboard est bien plus que cela ! Un sport, un jeu, un art, un style de vie… Il est quasi impossible de lui coller une étiquette. C’est la plus collective des activités individuelle qui amène à une ouverture sur le monde sans pareil.
Personnellement, cela m’a amené à la photographie, mais pour d’autres ce sera la vidéo, la musique, le dessin, l’architecture, la menuiserie, les voyages, le commerce, etc, etc
Aucun « sport » ne suscite autant de créativité, du moins pas à cette échelle.

Tu as emmené rider avec toi le Petzval 85. Quelles ont été tes premières impressions ?

Tout d’abord l’objet en lui même qui est magnifique et ne peut laisser insensible. Ce n’est pas tous les jours que je me balade avec un objectif en « or ». Il ne passe pas inaperçu loin de là et c’est un super objet pour se faire de nouveaux amis.
Les gens viennent vous voir pour savoir ce que c’est et comment cela fonctionne. Ensuite, à la prise en main, ça se complique un peu…

Comment ça s’est passé vous deux ? Est-ce que tu peux nous en dire plus sur ton expérience de l’objectif ? Sur ce que tu as aimé ou sur ce qui t’a déplu ?

La prise en main est un peu déstabilisante… J’ai commencé par pleurer mon autofocus !
En portrait, pas de soucis, l’objectif est vraiment fait pour ça et on obtient de suite des choses intéressantes. Il suffit de trouver un arrière plan avec du contraste, comme du feuillage par exemple, le bokeh tournant de l’objectif fait le reste.

Pour de la photo d’action, c’est un peu plus complexe.
La première semaine, j’ai essayé de shooter avec les réglages que j’utilise d’habitude. J’aime les grosses profondeurs de champs et de manière générale je suis toujours sur des ouvertures entre 1.4 et 2.8. J’ai donc commencé par utiliser la lamelle 1:2.2 et l’hexagone 1 :2.8.
La plage de netteté à ces ouvertures est très très courte et il n’est vraiment pas facile d’obtenir un sujet net. Même avec le viseur du D3s, qui est pourtant très confortable, j’ai raté pas mal de clichés. J’ai donc testé les autres lamelles mises à ma disposition et j’ai trouvé le bon compromis avec la 1:4. Là j’ai commencé à obtenir des clichés plus nets avec un grain et des noirs que j’aime beaucoup.
Le rendu est très « argentique » je trouve et j’aime beaucoup cela !

Peux-tu nous parler un peu de la série que tu as réalisée. Est-ce que tu as une photo préférée ou une photo qui a une histoire en particulier ?
Une petite playlist qui pourrait traduire l’essence de ta série peut-être ?

Ce n’est pas réellement une « série » au sens propre du terme… C’est juste ce que je fais dès que l’on va skater avec mes potes.
Une session s’organise, on se donne rendez vous et on part à l’aventure à la recherche de spots. Ils skatent et j’essai de documenter les actions avec mes clichés.
Donc pas vraiment de « playlist » . Le premier titre qui me vient à l’esprit serait « Summer in city » de Joe Cocker car tous les clichés ont été réalisé au mois d’Aout et que j’adore Paris particulièrement à cette période. Il fait chaud, la ville semble tourner au ralenti, il y a moins de monde dans le métro et les filles sont jolies !

Maintenant que tu as testé notre objectif, qu’est-ce que tu aurais envie de shooter avec lui en particulier dans le futur ?

Du portrait bien sur, car je n’en fais pas assez à mon gout et que j’aimerais progresser dans ce domaine.
Le Petzval est un super outil pour cela. Mais aussi du Skate car je suis sur que je n’ai pas encore exploité toutes les capacités de l’objectif.

Des conseils et astuces pour les néophytes qui souhaitent se lancer dans la photographie de skate ?

Pas facile comme question… Je pense que pour faire de bonnes photos de Skateboard il faut faire du skateboard soit même. C’est la meilleure façon de comprendre réellement l’action et de savoir quel est l’instant qu’il faut immortaliser. Et en même temps il faut être capable de prendre assez de recul pour que le cliché soit compréhensible par quelqu’un qui ne pratique pas.
Instinctivement on doit comprendre ce qu’il se passe. D’où vient le sujet et où il va. Après tout est une question de regard et de sensibilité.

Tu as « beaucoup de casquettes ». Tu gères aussi une boutique en plus de ton activité de photographe. Ces activités multiples sont-elles à ton sens complémentaires ? Si oui pourquoi ?

Effectivement, je suis un peu un couteau Suisse…C’est sûrement en partie l’époque qui veut ça je pense. Comme je l’expliquais un peu plus tôt, j’ai toujours voulu vivre du Skateboard. Dès que j’ai pu travailler je me suis donc rapproché de cette petite industrie et j’ai du y occuper à peu près tous les postes possibles. Le site Independentskateshop est une extension de tout cela.
Avec mon associé, Silvère, on voulait proposer un truc qui manquait en France. Une boutique CORE qui reflète notre vision de ce que devrait être un Skateshop. C’est loin d’être facile !
Le bon coté c’est que cela me laisse du temps pour shooter.
Tout est complémentaire et imbriqué, la boutique, les photos, les opérations marketing que je peux faire pour différentes marques, etc… Tout cela fait parti du Skate et de ma vie.

Des projets futurs dont tu aimerais nous parler ?

Les choses bougent pas mal pour moi dernièrement et les projets se multiplient ! Avec Etienne on travaille sur un nouveau projet de livre que nous aimerions réaliser l’année prochaine si l’on parvient à trouver les fonds pour le financer. Plusieurs marques me soutiennent depuis quelques années, notamment Stance et Brixton. J’ai aussi signé récemment un contrat « d’ambassadeur » avec la marque Electric California toutes ces collaborations vont donc participer et aboutir sur de nouveaux projets. La marque Wasted vient de me contacter pour que l’on développe une collection capsule pour le printemps prochain. C’est un projet très excitant sur lequel je devrais avoir beaucoup de liberté. Ce n’est pas tous les jours que l’on a la chance de voir ses clichés imprimés sur des vêtements et je suis vraiment flatté qu’ils aient pensé à moi !
J’ai également participé à un documentaire de 52 minutes sur le Skateboard et son univers qui devrait être diffusé sur la chaine Voyage avant la fin de l’année.
Je suis ouvert à toutes opportunités en fait ! Nous sommes la somme de nos expériences et j’ai encore tellement à apprendre !

Est-ce que tu as des photographes/artistes/musiciens/livres que tu aimerais nous faire découvrir ?

Musicalement je suis un énorme fan de punk rock et plus particulièrement de Bad Religion, je les suis depuis 1992, j’ai grandi avec leur musique, appris l’anglais avec les textes de Greg Graffin et Brett Gurewitz… C’est un peu la b.o. de ma vie !
En photographe de skate j’apprécie particulièrement le travail de Daniel Harold Sturt et J Grant Brittain et bien sûr l’incontournable Glen E. Friedman. Leurs clichés m’ont marqué à vie et ils m’inspirent au quotidien.
Sinon je m’intéresse plus aux choses que je n’arrive pas à faire comme le travail de Eric Lefort sur la nature et l’architecture ou celui de Stéphanie Di Domenico sur le nu et le portrait. J’adore leurs clichés, leur regard est totalement différent du mien ou d’un photographe de Skateboard. J’essai de trouver de l’inspiration dans leurs travaux pour porter un autre oeil sur mes clichés et obtenir un peu plus qu’une photo de Skate de plus.

Merci à toi d’avoir répondu à nos quelques questions !

écrit par mpflawer le 2015-09-16 dans #Gens #skateboard #lomoamigo

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